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Les enfants arrivent excités :
Parce qu'ils arrivent d'une activité ou d'un moment intense,
parce qu'au contraire ils ont dû se contenir ou se concentrer un long moment juste avant la séance,
parce qu'ils n'ont pas forcément demandé à être là,... L'état d'excitation est palpable, ça bougeotte, ça commente en sourdine, ça s'impatiente dès le départ.

Des pistes (sait-on jamais...) :
- Insistez pour que ce soit les accompagnateurs qui placent les enfants, qu'ils se répartissent au milieu du public. Vous n'interviendrez qu'au moment du spectacle.
- Ne tardez pas à commencer.
- Surprenez-les en ne répondant pas à leur excitation par une énergie équivalente. Au contraire, posez les choses avec un relief nécessaire.
- Prenez le temps de les regarder tous au départ.
- Conscientisez votre parole contée.
- Un petit air de musique ou des formulettes d'introduction seront les bienvenus.


Les enfants s'attendent à autre chose :
Il arrive parfois avec les groupes, que les enfants ne sachent pas ce qui les attend, parfois sous prétexte de "la surprise", parfois sans aucun prétexte particulier. Même si nous préférons qu'ils sachent où ils mettent les pieds, ceci n'est pas grave en soi.
Chose qui est plus délicate, c'est le groupe qui s'attend à autre chose : "Alors c'est toi le magicien" ?" , "Elles sont où les marionnettes ?" , ...
Ils n'ont pas énormément de références de spectacles, alors pour peu que vous arriviez après un spectacle de clowns, ils peuvent honnêtement penser que tous les spectacles se font avec des clowns.
Lors d'une racontée avec un centre de loisirs maternelles, les enfants lançaient souvent : "Ils sont où les animaux ?". Ceci nous semblait curieux, mais après tout...
C'est en partant que nous avons vu, dans le hall d'entrée de la salle, juste là pour décorer, une immense affiche de cirque avec lions, chevaux, chameaux et toute la ménagerie. Tous ont dû penser que c'était l'annonce du spectacle, et ont certainement attendu dans chacune de nos histoires l'arrivée des lions...

Des pistes (sait-on jamais...) :
- Si vous sentez un trouble, une légère ambiguité, n'hésitez pas à expliquer en deux phrases avant de commencer, qui vous êtes (ou qui vous n'êtes pas) et ce que vous êtes venu faire aujourd'hui.
- On peut en cas de doute leur demander : "Est-ce que vous savez ce que je suis venu faire aujourd'hui ?" Vous serez vite fixé.
- Posez la question aux accompagnateurs : "Qu'est-ce que les enfants savent du spectacle ?" ; "Ont-ils été préparés?" ; "Si oui, de quelle manière ?"


Les enfants ont des âges très différents :
Il est vrai que ceci peut être un avantage, ou plutôt une richesse lors d'une racontée. Les réactions se "complémentant", on pourrai arriver à une certaine pleinitude.
La plupart du temps, c'est tout de même assez compliqué.
Si vous avez un groupe de 3/12 ans en face de vous, il est certain qu'ils n'auront pas tous le même rythme, la même participation, les mêmes centres d'intérêts, les même peurs,...
On peut risquer le décrochage des uns ou des autres s'ils ne se sentent pas concernés.
Les grands peuvent parfois ne pas laisser les petits s'exprimer. Ces derniers ayant besoin d'un temps plus long pour réagir...
Alors, que faire ?

Des pistes (sait-on jamais...) :
- Nous avons pour habitude de cibler sur les plus jeunes lorsque les âges sont hétérogènes. En effet, les grands peuvent accepter de jouer le jeu des petits, et c'est parfois bien agréable pour eux de le faire, comme si on était petit, pour un temps. L'inverse est rarement vrai.
- Raconter des histoires "larges", c'est à dire avec des niveaux de lecture ou d'implication différents. Ce que nous pratiquons beaucoup dans ces cas là, ce sont de histoires avec des supports visuels, sonores, musicaux, gestuels, Chacun pouvant en fonction de ses aptitudes sensorielles motrices et mentales, tirer son épingle du jeu.


Un enfant veut attirer l'attention du public :
Dans le registre "Qui prend la parole, prend le pouvoir", un enfant ou un groupe d'enfants peut tout à fait consciemment ou pas, pratiquer à un déplacement du centre d'attention vers eux-même.
Les individus égo-centrés sont de plus en plus présents autour de nous et les enfants n'échappent pas à cette logique statistique.
Si vous racontez, cela vous est arrivé, forcément,. La question est de savoir comment le prévenir ? Comment percevoir les petits signes qui ne trompent pas ? Comment gérer ? Comment faire avec ?

Des pistes (sait-on jamais...) :
- S'appuyer sur ceux qui écoutent, fonctionne assez bien. Tout en essayant de ramener de manière positive "le perturbateur" vers le groupe de ceux qui écoutent.
- Il est clair qu'à un certain niveau, l'intervention revient obligatoirement aux accompagnateurs. Un petit regard incitatif vers l'animateur ou l'enseignant peut induire une intervention discrète de leur part.
Parfois, certains adultes n'osent pas intervenir de crainte de perturber d'avantage la séance et espèrant pieusement que "ça va se calmer"
- C'est une démarche éducative que de dire "stop" à l'enfant qui volontairement ou pas, désire franchir les limites posées en société. A priori l'accompagnateur est là pour ça. Ce n'est pas le rôle du conteur. Il n'empêche que si les premiers ne le font pas, il est nécessaire que le deuxième s'y colle. L'enfant en a besoin. Les autres membres du groupe aussi.
Tous vous remercieront de l'avoir fait.


Les accompagnateurs ne se sentent pas concernés :
Plus que de la participation de ceux qui accompagnent, on a besoin de leur adhésion.
En effet, à l'inverse de ce thème, il nous arrive de rencontrer en séance, des adultes qui participent de trop à l'histoire. A cet instant, l'adulte accompagnateur peut devenir un centre d'intérêt pour l'enfant étonné de le voir ainsi agir. L'enfant sort de l'histoire. Parfois... il s'inquiête.
L'adhésion de l'accompagnateur semblerait être une position plus adulte, plus accompagnante pour l'enfant. L'adulte est là en tant qu'adulte et celà est sécurisant.
L'adulte montre avec discretion son adhésion à l'histoire et ceci lui donne de la valeur, aux yeux de l'enfant. Bien entendu on considère que ce qui est raconté à sa valeur propre, sans quoi il sera compréhensible que personne n'écoute.
Attention, il arrive que les adultes se mettent à faire autre chose pendant la séance, il arrive qu'ils nous laissent seul avec le groupe d'enfants (histoires vécues), ou pire encore, ils se mettent à discuter en fond de salle. (C'est rare, mais ça arrive)

Des pistes (sait-on jamais...) :
- On a insisté auprès d'eux sur l'importance de leur adhésion au spectacle.
- On peut par du deuxième degré, lancer au cours de l'histoire un message, une métaphore aux accompagnateurs ... n'hésitez pas à passer au premier degré (quitte à créer une parenthèse dans votre histoire) si vous sentez que le message n'est pas passé.
- Il est nécessaire de bien rappeler le rôle de chacun. Ce qui est difficile, c'est d'être obligé de redéfinir les rôles de chacun et de pouvoir le faire à l'intérieur d'une racontée.


Les accompagnateurs ne gèrent pas :
Il peut arriver que le conteur soit obliger de sortir de son univers pour revenir dans celui de la règle, de la loi.
Comment le faire avec finesse, avec respect, de manière artistique,...?

Des pistes (sait-on jamais...) :
- Anticipez les situations et préparez-vous des petites phrases à destination des enfants et d'autres à destination des accompagnateurs. Même si vous ne vous en servez pas, elles sont là, au cas où .
- Anticipez avec des recommandations auprès des adultes, avant la séance.
- Un petit mot d'un enseignant, d'un directeur du centre, à destination des enfants, juste avant le début du spectacle, sur ce qui les attend et ce qu'on attend d'eux peut être un bon message collectif pour tous ceux qui accompagnent.




Points de vue de Conteurs... et autres avis éclairants :
Pour apporter votre témoignage

Joel Contival - Comédien conteur auteur - au sujet de "Un enfant veut attirer l'attention du public"
"En tant que conteur, je théâtralise beaucoup mon jeu, ce qui me permet d'installer un rythme encore plus vivant, et provoquer l'attention tant par le corps, que le regard et bien sûr les mots.
L'interactivité et l'improvisation faisant partie intégrante de mon spectacle, je laisse facilement les enfants interrompre mon histoire, j'essaye autant que faire se peut, que cela ne nuise pas au déroulement naturel, ce sont donc des interruptions très brèves et je reste maître du jeu. Mais si un enfant se met à prendre la parole systématiquement au point de nuire à la qualité d'écoute, voici la méthode que j'utilise, je lui demande de venir me rejoindre (Ou il se calmera où il viendra sur le plateau) et de jouer l'un de mes personnages, en général, cet enfant se retrouve à mes côtés, il devient mon complice et peut ne plus ouvrir la bouche, mais restera très attentif. (se retrouvant tout intimidé devant le public), dans d'autres cas, il jouera d'une manière très spontanée et viendra enrichir l'histoire. Une façon de canaliser l'énergie.
Toujours essayer de" transformer" un instant plutôt que de s'opposer. (Il m'est arrivé une fois d'avoir plus d'enfants sur scène que dans le public...). Heureusement, qu'une fois sur scène, la fée de l'improvisation n'est jamais loin pour qu'un "souci" devienne un "cadeau" pour le conteur...
Encore bravo pour votre site. Amitiés
Joël (septembre 2006)
Pour en savoir plus sur ce conteur : http://www.joel-contival.com

François Kokelaere - Cie l'Heure du Thé - au sujet de "Les accompagnateurs ne se sentent pas concernés""
"Bonjour et bravo pour votre site bourré d'informations et de liens passionnants.
Ce que je n'y ai pas trouvé, c'est une réflexion sur le comportement, paradoxal et surprenant, souvent désarmant, de nombreux institutrices et instituteurs, appelons les "instits", pour faire court (sauf le respect que je leur dois et toute l'affection, sincère, que je leur porte) qui durant les séances à destination du Jeune Public, ont des comportements étranges.
Il y a quelque jours, deux d'entre elles papotaient pendant le spectacle et parlaient si fort, qu'elles couvraient le murmure des enfants. J'ai dû diminuer la voix, jusqu'à murmurer afin qu'elles comprennent que leur attitude était déplacée. Elles se sont tues, l'espace d'un instant, pour reprendre de plus belle. Les mêmes instits sont parties après la séance sans un commentaire, ni même un au revoir... Elles n'avaient pourtant pas l'air fâchées, seulement désintéressées! N'est-ce pas pire?
La séance suivante, une autre, se jetait sporadiquement sur les enfants immobiles, en prétextant leur agitation (?), il se trouve que les enfants en question, pour une fois, n'avaient jamais été aussi calmes. Ceci mettait une pression énorme sur les autres enfants (on ne parle même pas des petits en question qui se retrouvaient propulsés dans un coin, sans avoir compris ni pourquoi, ni comment...), les déconcentrait et les déstabilisait (on parle encore moins de l'artiste qui devait faire appel à toute son expérience pour rester concentré).
Comme si, ces instits n'acceptaient pas que l'enfant prenne un moment de plaisir, qu'il puisse s'exprimer, rêve, voyager, exister en dehors de leur autorité.
Comme si ces instits n'arrivaient pas à dissocier ce qu'ils vivent au quotidien avec les enfants, du moment privilégié du spectacle, un peu hors du temps. Justement ce moment magique où les enfants échappent, l'espace d'un instant, à la contingence quotidienne.
Comme si les instits ne supportaient pas qu'un élément extérieur vienne bouleverser leurs habitudes.
Comme si les instits considéraient les enfants comme "leur chose" et qu'eux seuls savaient ce qui est bon pour eux...

Ne croyez-pas que cette situation est exceptionnelle, elle est beaucoup plus courante qu'il n'y paraît, et principalement en milieu rural, lorsque les enfants et donc les instits, n'ont que très peu accès au spectacle vivant. Dans le département où je sévis (le Cher), on estime à 40% des enfants, essentiellement ceux qui vivent en milieu rural, qui n'ont pas ou peu, accès à la culture durant leur cycle du premier degré. Pour le second degré, c'est un peu mieux, puisque le Conseil général essaie que tous les enfants aient accès à "au moins" (même si cela peut paraître dérisoire) un projet artistique durant les quatre ans de leur cycle. Quant au lycée, là, c'est le désert. Alors comment voulez-vous que les instits, issus du même désert culturel, aient le goût et la pratique du spectacle vivant. Acculturés ils ont été, ne nous étonnons pas qu'ils acculturent!

Bien sûr, ils ont toutes les excuses du monde face à l'énorme travail que demande l'encadrement de nos petits diables mais ne faudrait-il pas déjà, qu'eux-mêmes, disposent d'une formation sérieuse à l'IUFM concernant l'attitude, l'approche et l'utilité du spectacle vivant car ils donnent l'impression d'être totalement désarmés, désorientés, désintéressés. Ne serait-il pas nécessaire qu'ils possèdent un minimum de culture générale, quelques repères, quelques outils?
Les quelques fois où j'ai eu l'occasion d'intervenir en IUFM, j'ai été atterré par le niveau et le comportement des futurs enseignants et du renoncement des formateurs. Comme si il y avait une véritable rupture entre la jeune génération qui devient instit par nécessité et l'ancienne qui était avant tout passionnée.
Ce qui me terrifie dans tout cela, c'est qu'au milieu de toutes ces dérives comportementales, de toutes ces fermetures, de toutes ces contradictions, il y a les "p'tiots", qui ne demandent qu'à découvrir le monde et à s'ouvrir aux autres. Encore faut-il que les adultes n'en fassent pas les otages de leur souffrance existentielle?

Toutefois, ne généralisons pas. La grande majorité des enseignants sont des gens ouverts, cultivés et qui tentent, contre vents et marées, de faire leur travail le mieux qu'ils peuvent, dans des conditions souvent extrêmement difficiles. Mais comme par hasard, ce sont rarement ceux-là qui sont les plus fermés...

Bien cordialement.
François Kokelaere - Cie l'Heure du Thé (Mai 2008)
Pour en savoir plus sur ce conteur : http://www.heureduthe.com

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